Une série de débats pour enfin prendre nos responsabilités pour retrouver un climat stabilisé

La séance a été large et son résumé n'apportera pas autant que son visionnage intégral que nous recommandons sur le lien facebookhttps://fb.watch/42ns3wVvzo/

Le montage de 24 minutes est disponible ICI 

Un résumé texte est proposé ICI 

Exposés : Ressources Revenu ClimatExposé de Maxime Blondeau, ressource CarbonWatchDiaporama sur les quotas individuels

En texte intégral d'abord les enseignements rédigés par Pierre Calame (et son test disponible ICI ) puis en bas de page son rappel des enjeux de cette quatrième session.

Quelles solutions sont envisageables pour satisfaire à l’obligation de résultat ?

Leçons tirées de la quatrième séance des assises du climat

Où en sommes-nous ?

Après avoir, au cours des trois premières séances, énoncé la nécessité d’une obligation de résultat portant sur l’empreinte carbone de la société européenne et française et évalué les difficultés actuelles de mesure de cette empreinte (séance 1), acté la volonté politique de l’Union Européenne de mettre la lutte contre le réchauffement climatique au sommet de l’agenda politique mais noté qu’à ce jour la politique européenne ne prenait en compte ni l’obligation de résultat ni l’empreinte carbone totale de la société européenne (séance 2), puis examiné les réformes nécessaires du droit pour que soit assumée réellement la coresponsabilité de tous les acteurs à l’égard du réchauffement climatique (séance 3), nous sommes entrés à partir de cette quatrième séance et jusqu’à la huitième dans l’examen et le débat des différentes solutions envisageables pour la mise en œuvre effective de l’obligation de résultat, à l’échelle européenne et française. Elle implique un plafonnement, donc un rationnement, de l’empreinte carbone avec abaissement du plafond de 5 ou 6 % par an pour assumer nos responsabilités et engagements vis-à-vis du climat.

Le cahier des charges commun aux différentes solutions

Les trois premières séances ont permis de dégager un cahier des charges en six points :

1. Nous devons réduire à un rythme annuel défini, 5 à 6 %, les émissions de dioxyde de carbone résultat du mode de vie de la société, appelées « empreinte carbone totale ».

2. Cette réduction doit faire l’objet d’une obligation de résultat, opposable en particulier aux autorités publiques, européennes et nationales, à charge pour elles de mettre en place les mécanismes faisant contribuer tous les acteurs à cette réduction.

3. La réduction doit être basée sur l’empreinte carbone totale et non sur les inventaires nationaux, ce qui implique la prise en compte de la production « importée » de gaz à effet de serre, parce qu’incorporée dans les biens et services que nous consommons, ce qui implique la traçabilité des émissions carbonées tout au long des filières de production.

4. Les solutions proposées doivent associer obligation de résultat et impératif de justice sociale.

5. Elles doivent parvenir à un découplage entre développement du bien être des sociétés et consommation d’énergie fossile.

6. Enfin, il faut s’assurer que les mesures proposées sont physiquement, techniquement et financièrement réalisables, en prenant en compte le fait que les mécanismes globaux mis en place seront un puissant stimulant à des innovations de tous ordres.

Comparaison de trois familles de solutions

Pierre Calame a proposé dans son introduction de classer les solutions envisagées en trois grandes familles :

Famille 1 : le signal prix. Réduire progressivement la demande en fixant un prix de plus en plus élevé à la tonne de dioxyde de carbone rejeté dans l’atmosphère et en redistribuant, selon des modalités à définir, les revenus tirés du prix élevé du carbone, de façon à respecter un principe de justice sociale.

Famille 2 : la combinaison de politiques sectorielles visant à définir des réductions de l’empreinte carbone dans tous les domaines en se fixant pour chacun d’eux des objectifs chiffrés et en mettant en oeuvre pour y parvenir interdictions, obligations, incitations, investissements publics, innovations techniques, fiscalité.

Famille 3 : l’allocation de quotas : répartir selon une clé prédéfinie le total de l’empreinte entre les acteurs. C’est la gestion la plus directe du rationnement. Cette famille se décompose en deux sous-familles très différentes :

- famille 3.1. : les quotas sont alloués aux secteurs d’activité et aux entreprises ;

- famille 3.2. : les quotas sont alloués aux personnes considérées comme les bénéficiaires finaux et les clients de l’activité économique et de l’activité des administrations.

Les intervenants

Nous avions prévu initialement des temps de parole répartis entre les promoteurs des différentes familles de solutions. Pour des raisons liées aux agendas des uns et des autres, a été privilégiée pour cette première séance la première famille de solutions, par le signal prix et la fiscalité carbone, abordée par les quatre premiers intervenants :

- Christian De Perthuis, fondateur de la chaîre Economie du climat ;

- Géraud Guibert, conseiller maitre à la cour des comptes, président fondateur de la Fabrique écologique ;

- Bettina Laville, conseillère d’État, présidente du comité 21, impliquée depuis plus de trente ans dans l’action politique en matière de réchauffement climatique, directrice de cabinet du ministre de l’environnement Brice Lalonde de 1988 à 1992, conseillère environnement de deux premiers ministres, Pierre Bérégovoy puis Lionel Jospin et du président de la république François Mitterrand, et à ce titre ayant participé activement aux conférences de Rio (1992) Kyoto (1998) et Johannesburg (2002) ;

- Christian Gollier, directeur de l’école d’économie de Toulouse et président de l’association européenne des économistes de l’environnement.

À travers leurs interventions, ont été néanmoins abordées les solutions de la deuxième famille, l’action sectorielle, et de la famille 3.1., l’action par les quotas alloués aux entreprises.

Trois autres intervenants sont venus apporter un contrepoint :

- Denis Payre, entrepreneur en série, créateur de l’association Nature et People First et promoteur du « contrat mondial » ;

- Maxime Blondeau, enseignant à Science Po et à Mines Paris et fondateur du syndicat « Printemps écologique » ;

- Armel Prieur, président de l’association pour l'emploi sans carbone, retraité du Conseil Européen et animateur du réseau « compte carbone ».

Les sessions suivantes permettront d’équilibrer les présentations des différentes familles.

La session 5 mettra en débat les solutions de la première famille, le signal prix. La session 6 sera consacrée aux solutions de la deuxième famille, les actions sectorielles, les sessions 7 et 8 à la troisième famille et plus particulièrement au système des quotas individuels.

Les politiques actuelles privilégient des démarches sectorielles malgré leurs contradictions et leurs échecs.

Aussi bien au niveau français qu’au niveau européen les politiques mises en œuvre jusqu’à présent ont appartenu à la famille des politiques sectorielles, et à la famille 3.1. avec le marché d’échange de quotas entre entreprises mis en place par l’Union Européenne depuis 2005 et premier marché mondial d’échange de quotas.

 

Si l’on opte pour la continuité, il est nécessaire d’examiner les limites actuelles de ces deux formes de politique et d’en apprécier les transformations possibles pour plus d’ambition et plus d’efficacité.

Ces limites ont été notamment soulignées par Géraud Guibert et Maxime Blondeau.

Ils observent tout d’abord que ces politiques sectorielles, que l’on peut qualifier « d’obligations de moyens » sont peu effectives. En effet, au lieu de concevoir une solution globale orientant dans la durée le comportement de tous les acteurs, on morcelle les politiques et, ce faisant, on réveille dans chaque secteur des lobbies dont chacun, en général, tente de limiter la portée des mesures prises, et ce d’autant plus que dans chaque domaine, comme le logement, l’industrie automobile, l’agriculture, etc.. l’enjeu de lutte contre le réchauffement va entrer en concurrence avec d’autres objectifs.

Christian Gollier note également le risque que ces politiques sectorielles continuent d’entretenir des illusions. Réduire de 5 à 6 % par an l’empreinte carbone de la société, alors que depuis la révolution industrielle toute la croissance et l’augmentation du niveau de vie ont été fondées sur la substitution de l’énergie fossile à l’énergie humaine et animale, implique un bouleversement profond de la société. L’addition de mesures sectorielles laisse imaginer que tout cela se fera sans douleur et sera créateur de millions d’emplois qualifiés. Rien n’est moins sûr.

Ces politiques sectorielles, fondées sur des obligations de moyens, sont en outre souvent assorties de faibles contrôles et de sanctions peu dissuasives, ce qui leur retire efficacité et crédibilité. Géraud Guibert en a cité des exemples comme celui des ascenseurs. Maxime Blondeau a fait observer que la loi impose aux acteurs privés et publics d’une certaine taille d’évaluer leur bilan carbone total, ce qui va dans le sens d’une évaluation d’empreinte carbone de la société, mais que cette loi est restée lettre morte dans la grande majorité des cas, son non respect étant assorti de sanctions dérisoires. Cette observation rejoint l’observation plus générale faite par le juriste de l’environnement Laurent Neyret : dans l’état actuel, ne pas respecter les réglementations peut apporter de grands bénéfices pour un risque des plus limités.

Christian Gollier a fait en outre observer que les politiques sectorielles conduisent bien souvent à promouvoir des actions coûteuses pour un résultat limité et à laisser de côté au contraire des actions dont le coût bénéfice est bien meilleur. Il prend en exemple la substitution en Europe de centrales au charbon par des centrales au gaz, qui représenterait un coût de 40 euros par tonne de CO2 économisée, car à énergie produite donnée les centrales au gaz émettent deux fois moins de dioxyde de carbone que les centrales à charbon. Il oppose à cette mesure celle des subventions allouées en France à l’installation de panneaux photovoltaïques qui représentent 350 euros de subventions par tonne de dioxyde de carbone économisée, soit près de dix fois plus.

Bettina Laville a fait observer qu’en raison du « tabou » qui frappe aujourd’hui l’idée d’augmenter le prix du carbone, tabou sur lequel on reviendra, la Convention citoyenne sur le climat, CCC, s’est trouvée enfermée dans cette approche sectorielle. L’idée d’agir sur le prix du carbone a été immédiatement écartée et, comme on l’a vu à la session 3, l’idée de quotas a été mise de côté par les organisateurs. Ce qui a eu pour résultat de donner l’impression que « le peuple » ne veut pas de solution globale au problème du réchauffement climatique. Et, de fait, les propositions de la Convention sont une juxtaposition de mesures sectorielles dont Bettina Laville fait observer, de surcroît, qu’elles ont introduit 7 ou 8 niches fiscales ou taxes sur le carbone s’ajoutant à celles qui existaient déjà.

Portée et limites du marché des quotas allouées aux entreprises

Christian De Perthuis, Géraud Guibert et Christian Gollier ont tous trois manifesté leur intérêt pour les quotas carbone alloués aux entreprises (famille 3.1). Ces quotas sont limités aujourd’hui aux 11000 installations industrielles les plus grosses émettrices de l’Union Européenne. Elles représentent toutes ensemble 45 % des émissions territoriales. Selon les données de la Commission Européenne, elles ont permis en quinze ans une réduction de 21 % des émissions. Le marché des quotas a été révisé à partir de 2013 avec un mécanisme de mise aux enchères et l’objectif fixé a été de réduire les émissions de 2,2 % par an à partir de 2021.

De l’avis des intervenants, la portée de ce marché du carbone s’est trouvée jusqu’à présent réduite par trois facteurs :

- elles ne concernent que 45 % des émissions territoriales sur le sol de l’Europe ;

- leur ambition, même après 2013, est sans rapport avec le rythme de réduction moyenne des émissions qu’il faut respecter maintenant ;

- et surtout, dans cette approche, ce n’est pas l’ensemble de l’empreinte carbone qui est concernée : le rapport avec le reste du monde se trouve limité à la question du risque de perte de compétitivité des entreprises européennes face à des concurrents qui n’auraient pas les mêmes contraintes. D’où l’allocation de quotas gratuits à toutes les industries européennes confrontées à la concurrence internationale, ce qui limite d’autant l’idée de valeur du carbone.

Christian De Perthuis estime que ce système offre de grandes potentialités : si, selon lui, il s’est montré depuis 15 ans peu efficace, c’est avant tout parce que les objectifs qu’on lui a assignés étaient eux-mêmes trop modestes. Comme il le dit : « le jugement sur les outils est en fait un jugement sur les objectifs ». Il envisage deux voies d’amélioration :

- l’élargissement du champ couvert par le système des quotas, notamment en direction des secteurs du bâtiment et des transports, pour s’approcher progressivement d’un rationnement de l’ensemble des émissions territoriales ;

- un mécanisme d’ajustement aux frontières, d’une part pour intégrer l’empreinte carbone totale et d’autre part pour taxer au même niveau le CO2 à l’importation, condition par ailleurs pour supprimer la gratuité des quotas alloués à différentes industries, qui constitue selon lui le plus grand soutien actuel aux énergies fossiles. Il exhorte, « plutôt que d’inventer des systèmes nouveaux, de pousser à la réforme du système européen des quotas qui a le mérite d’exister ».

Christian Gollier y ajoute naturellement un troisième objectif : une décroissance des quotas de 5 à 7 % d’année en année, condition de respect de l’obligation de résultat.

Ces propositions posent néanmoins une série de questions qui devront être éclaircies lors des séances suivantes :

- on reste sur le registre des émissions territoriales et « l’énergie importée » n’est vue que sous l’angle de la compétitivité des entreprises européennes, non sous celui de la prise en compte de la totalité de l’empreinte carbone ;

- « l’ajustement aux frontières » est l’euphémisme utilisé pour taxer le dioxyde de carbone importé et la question de la compatibilité avec l’Organisation Mondiale du Commerce se trouve sérieusement posée, au point comme le fait observer Denis Payre, de compromettre la mise en œuvre de solutions efficaces sur le sol européen. Il l’a illustré par un cas concret très éloquent : l’énergie renouvelable éolienne ou solaire étant intermittente, les solutions le stockage temporaire (sur plusieurs heures par jour, sur plusieurs jours, sur plusieurs mois) de l’énergie produite pour faire coïncider cette production avec son usage sont au cœur de son développement. Les études montrent que le meilleur rendement est obtenu par le stockage sous forme d’énergie hydraulique (on pompe et on remonte l’eau avec l’énergie excédentaire, on turbine l’eau pour produire de l’électricité à la redescente). Or, dans le cas concret du projet qu’il a pris pour exemple cette solution est rendue moins rentable que le stockage par des batteries chinoises, bien plus dommageables pour l’environnement, parce que le prix horaire du travail en Chine n’est que le sixième du prix français et que les dégâts environnementaux massifs, notamment liés aux terres rares, ne sont tout simplement pas prises en compte, sans parler du coût énergétique même de la production de ces batteries. Ce qui lui fait dire que dans l’état actuel des choses « on importe à la fois du carbone et du chômage ». Il estime donc que le système ne peut être rééquilibré que si une alliance des démocraties libérales conduit à une réforme radicale de l’OMC, le « contrat mondial » qu’il appelle de ses vœux.

Dans tous ces exemples, c’est l’Union Européenne qui est en première ligne.

Pourquoi l’action par le prix du carbone, qui fait consensus parmi les économistes classiques, est devenue aussi difficile à défendre ?

Les quatre premiers intervenants se sont montrés de fervents soutiens de la première famille de solutions, celle de l’action par le signal prix. Mais, avant d’en détailler les conditions de réussite, ils ont reconnu que la multiplication des erreurs a, du moins provisoirement, rendu cette solution politiquement indéfendable.

Pour comprendre ce qui s’est passé, il faut garder en mémoire une donnée fondamentale : l’élasticité des consommations directes d’énergie fossile en fonction du revenu est positive mais inférieure à 1. En d’autres termes, plus on est riche, plus on a une empreinte carbone importante, mais la croissance de cette empreinte est plus lente que la croissance des revenus : les ménages les plus pauvres ont de nombreuses dépenses énergétiques « contraintes » dans leur vie quotidienne, en particulier pour le chauffage et pour les déplacements. Ils ont également une consommation contrainte, pour leur alimentation et leur habillement mais dans ce cas il est difficile de distinguer émissions territorialisées et émissions importées. Le pourcentage de ces consommations indispensables dans leur budget est bien supérieur à leur poids chez les ménages les plus riches, ce qui explique l’importance de la précarité énergétique : les ménages les plus modestes sont parmi ceux qui ont le plus long trajet domicile travail, des voitures moins économes (du moins rapportée à la cylindrée) et des coûts de chauffage élevés notamment en raison de la mauvaise isolation des logements.

Or, les politiques de réduction de l’empreinte carbone par l’augmentation du prix du carbone menées jusqu’à présent ont été des politiques sectorielles. C’est déjà le cas de la TICPE, la taxe intérieure sur la consommation des produits pétroliers, qui frappe essentiellement les carburants pour les voitures et pour le chauffage, tandis que les grandes entreprises, l’agriculture et de nombreux autres secteurs économiques bénéficient d’exemptions ou de quotas gratuits. Ces taxes sont donc des impôts « régressifs » (l’inverse d’un impôt progressif dont le taux s’élève avec le revenu) : elles pénalisent les plus pauvres et augmentent les inégalités sociales. C’est déjà cette considération qui a conduit le Conseil Constitutionnel en décembre 2009 à « retoquer » la « contribution climat énergie » qu’à la suite du Sommet de Grenelle le gouvernement Sarkozy avait voulu instaurer, avec une progressivité annoncée d’avance pour passer de 17 euros à 100 euros en vingt ans. Le Conseil Constitutionnel a jugé que cette contribution ne respectait pas deux principes fondamentaux : l’égalité devant l’impôt et l’intérêt général.

 

Comme l’a fait observer Bettina Laville, il faut examiner ces deux arguments différemment :

- l’inégalité devant l’impôt était patente, seules 48 % des émissions territoriales de gaz à effet de serre étaient concernées, et la contribution pesait à plus 60 % sur les ménages. Au bout du compte, cette nouvelle contribution se résumait pratiquement à une augmentation annuelle de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Impôt régressif, donc.

- le second argument du Conseil Constitutionnel était que cette contribution n’était pas conforme à l’intérêt général. Sur ce point, Bettina Laville fait une observation qui rejoint le débat de la session 3 : par un retard que l’on a constaté de la pensée juridique sur les nouvelles réalités, « l’intérêt général », comme la responsabilité, ne concerne aujourd’hui dans l’esprit des juristes que les relations entre les personnes. Il faudrait passer de l’idée d’intérêt général à l’idée de « défense du bien commun » : le maintien de nos équilibres de vie est devenu vital et, ajoute-t-elle « que veut dire l’égalité devant l’impôt si en son nom on détruit nos conditions de vie ? ».

A toutes ces tentatives impopulaires pour taxer ainsi l’énergie - la taxe sur les carburants prévue pour le 1er janvier 2019 a été le déclencheur du mouvement des gilets jaunes- se sont ajoutées deux facteurs aggravants :

- aucune mesure redistributive sérieuse n’était prévue ;

- cette taxe venait simplement, comme la TICPE, abonder le budget de l’État selon le vieux principe d’unicité de ce budget. Ce qui a retiré toute visibilité à ces augmentations fiscales, n’en gardant que l’aspect d’aggravation des inégalités sociales. Or, rappelle Bettina Laville, sans visibilité, pas de consentement à l’impôt[1].

Comme nous allons le voir, les partisans de la première famille de solutions, par le signal prix, sont unanimes pour promouvoir une approche radicalement différente de celle qui a prévalu jusqu’à présent.

Les principes fondamentaux du « signal prix »

Entre les quatre intervenants qui ont présenté leur vision de la famille 1, le « signal prix », il y a un large consensus sur un certain nombre de principes fondamentaux et quelques divergences qui devront être mises en débat à la cinquième session.

Principes fondamentaux :

a) Il doit s’agir d’une mesure globale fixant à l’avance une progression du prix du carbone de 5 à 7% par an, ce qui exclut d’exempter telle utilisation de l’énergie fossile ou telle branche économique au nom d’impératifs sociaux ou de la concurrence internationale.

b) Le produit de cette taxe doit être intégralement redistribué, sur une base d’égalité entre tous, ce qui en fait un impôt progressif, reportant l’essentiel de l’effort de la transition sur les revenus les plus élevés.

c) Cette augmentation prévisible et cette redistribution transparente permettent à tous les acteurs publics et privés d’adopter des stratégies à long terme de transformation du mode de vie, des systèmes de production, d’aménagement du territoire et de développer l’innovation technologique.

d) Dans l’idéal, un tel prix du carbone devrait être mondial. C’est hors de portée sans doute pour l’instant. Mais pour intégrer l’ensemble de l’empreinte carbone et éviter qu’un prix élevé n’ait pour première conséquence la délocalisation des activités économiques, il faut l’instaurer au niveau européen, mettre en place une traçabilité carbone des filières et aboutir à une réforme de l’Organisation Mondiale du Commerce rendant possible la prise en compte intégrale de la valeur carbone des importations au même prix que la valeur européenne.

e) La réforme de la taxe carbone doit être l’occasion d’une mise à plat générale de la fiscalité, selon le principe « l’impôt contribue à la justice sociale et au bien commun ».

f) Les uns et les autres excluent l’idée de « fléchage » du produit de l’impôt en direction de telle ou telle politique sectorielle : c’est la dynamique d’ensemble de l’augmentation du prix du carbone qui fera naître les évolutions souhaitées.

g) Il faut être très explicite sur le fait que ce rationnement géré par les prix induira des transformations structurelles de la société qu’il faut annoncer, assumer et accompagner.

La divergence principale qui s’est manifestée entre les quatre intervenants porte sur la question de savoir s’il faut un prix unique du carbone ou des prix différenciés. Christian Gollier estime impératif qu’il s’agisse d’un prix unique. Géraud Guibert est d’un avis contraire, du fait des consommations obligatoires. Cette question essentielle devra être élucidée au cours de la session 5.

Le principe des quotas individuels négociables

Armel Prieur en a fait une présentation succincte en fin de réunion. Les séances 7 et 8 y seront consacrées. On ne retiendra ici que quelques points essentiels :

a) Des quotas individuels sont distribués également à tous les citoyens, avec une allocation annuelle de points carbone qui décroîtra d’une année sur l’autre, par exemple de 5 à 6 %, pour respecter l’objectif de réduction de 80 % de l’empreinte carbone en 2050, conformément aux chiffres du Conseil au Climat.

b) Ce compte carbone créé une véritable monnaie : chaque achat est débité en euros et en points carbone.

c) Le cycle de production des entreprises doit être neutre en carbone, pour cela elles intègrent dans le contenu « carbone » de vente de leurs produits le contenu carbone issu de l’ensemble de la filière. Ce qui signifie que les ménages reçoivent une dotation annuelle tandis que les entreprises ne reçoivent qu’une dotation de départ. Même règle pour les administrations, impôts et taxes se paient à la fois en euros et en points carbone (ce qui fera prendre conscience de la consommation d’énergie fossile dans les services publics).

d) Le développement de la monnaie numérique rend aisé de disposer des deux monnaies sur la même carte.

e) Pour engager les investissements nécessaires, notamment pour augmenter l’efficacité énergétique, il est possible d’emprunter de la monnaie carbone dans les mêmes termes que les emprunts actuels en euros.

f) Les personnes et ménages frugaux capables de réduire leur besoin en carbone ont la possibilité de vendre leur excédent à ceux qui ont maintenu un mode de vie plus dispendieux. Le marché correspondant du carbone s’organise à un premier niveau régional, puis au niveau national puis au niveau européen.

g) Le système est concevable au niveau d’un pays comme la France mais, du fait de la liberté des échanges sur le marché unique européen, c’est au niveau européen qu’il est souhaitable d’organiser le système.

Signal prix et quotas individuels négociables sont-ils une seule et même chose ?

C’est un point de débat essentiel pour les séances futures. Géraud Guibert estime que signal prix (famille numéro 1) et quotas individuels (famille 3.2) sont les deux faces d’une même monnaie puisque le marché des quotas donne dans les faits un « signal prix ». Or, sans marché d’échange de quotas, on aurait automatiquement du marché noir. Le marché des quotas, comme le prix carbone, ont à ses yeux le même mérite, donner une valeur de plus en plus forte à la tonne de dioxyde de carbone émise. Selon moi, signal prix et quotas alloués à des entreprises sont très proches. D’ailleurs les quatre intervenants favorables à l’action par le prix du carbone sont également favorables à l’élargissement du système d’échange de quotas entre entreprises. Par contre, il existe de très profondes différences entre la famille 1, le signal prix, et la famille 3.2., les quotas individuels négociables.

Première différence, l’obligation de résultat associée au signal prix reste indirecte. Pour que les acteurs disposent vis-à-vis du prix du carbone de la visibilité nécessaire pour prendre des décisions en moyen et long terme, la relation entre augmentation annuelle du prix du carbone et réduction de l’empreinte carbone ne sont pas équivalents. Christian Gollier fait observer que dans l’immédiat et sur la base de comparaisons internationales, l’élasticité prix des consommations énergétiques directes est de 1 : le prix du carburant des voitures en Europe est le double de celui des USA et la consommation des voitures européennes est la moitié de celle des voitures américaines. Il est néanmoins dangereux d’extrapoler au fur et à mesure qu’on se rapproche de consommations essentielles, dont la réduction suppose des transformations fondamentales de la société. L’intérêt des quotas individuels est leur lisibilité immédiate et de ce fait leur prévisibilité sur le long terme. Cette lisibilité, comme l’a rappelé Bettina Laville est une condition majeure d’acceptabilité.

- Dans un domaine où la symbolique compte, la différence entre les deux est essentielle. Dans le cas du signal prix, c’est une redistribution des revenus des taxes entre tous les ménages qui redonne un avantage aux ménages les plus modestes et à ceux qui font des efforts de frugalité. Mais le mécanisme des prix, et c’est la raison pour laquelle il y a consensus entre les économistes en sa faveur, découle d’une science économique contemporaine de la révolution industrielle et qui a reposé précisément sur l’idée d’une croissance infinie. Les quotas reposent sur un modèle symbolique différent : le rationnement est totalement assumé, comme expression de la finitude de la planète et l’égalité des quotas exprime l’égalité des citoyens devant un bien rare.

- Troisième différence, le rapport à l’empreinte carbone. Faute d’un accord mondial sur le prix du carbone, il n’y a pas avec le « signal prix » de mécanisme direct de traçabilité de la filière carbone hors du territoire européen et l’équilibre n’est rétabli que moyennant le principe d’ajustement aux frontières, impliquant de fait une renégociation de l’Organisation Mondiale du Commerce. Dans le système des quotas, les entreprises doivent prendre en compte le contenu carbone de ce qu’elles importent, pour le débiter à leurs clients, sans qu’il y ait pour autant taxation des importations, ce qui rend leur application immédiate, sans nécessité de renégociation des accords commerciaux.

***

À ce stade nous pouvons pressentir de futurs débats plus que passionnants…

 


[1] Ce qui avait valu son limogeage à la ministre de l’écologie Delphine Batho qui avait déclaré en 2013 dans les médias qu’elle s’opposerait à la récupération de la taxe carbone pour financer le CICE.


Présentation de la quatrième session (4 mars) des Assises du climat

Texte de Pierre Calame le 27/02/2021 disponible ici

 

Cette quatrième session est un moment charnière des Assises.

Leçons principales des trois premières sessions

Après avoir examiné en première session les questions posées par l’évaluation de l’empreinte carbone totale de la société française et européenne ainsi que par la détermination du rythme annuel de réduction de cette empreinte pour assumer nos responsabilités et engagements de lutte contre le réchauffement climatique (session1), nous avons constaté qu’existait maintenant dans l’Union européenne une réelle volonté politique de prendre au sérieux cette lutte mais que le Pacte Vert en cours d’élaboration n’assumait encore ni l’empreinte carbone totale de la société européenne ni une véritable obligation de résultat (session 2).

La troisième session nous a fait constater qu’en l’état actuel du droit national et international l’incapacité de nos sociétés à assumer leurs responsabilités et à tenir leurs propres engagements n’était pas sérieusement sanctionnée. Néanmoins la multiplication des décisions de justice, contre des États ou contre des très grandes entreprises, montre que les objectifs que se fixent les grandes institutions en application de l’accord de Paris leur sont opposables et qu’elles ne peuvent plus aussi facilement qu’autrefois y échapper en se fixant des obligations de résultat à long terme : c’est bien sûr à la réduction annuelle de l’empreinte carbone qu’elles doivent être jugées. La session nous a aussi rappelé qu’il serait trop facile de chercher du côté de l’État ou des grandes entreprises des boucs émissaires : il faut agir à la fois sur l’offre et la demande d’énergie fossile, faire naître chez tous les acteurs une conscience commune de leurs responsabilités et de la nécessité de changements profonds des modes de production et de vie, inventer les mécanismes économiques et juridiques incitant tous les acteurs à ces profonds changements. Ces changements, à ce jour, ne sont pas encore engagés, ni même réellement conçus, comme le rappellent les cris d’alarme répétés des experts et, tout récemment encore le rapport des Nations Unies, sur la mise en œuvre des accords de Paris : limiter le réchauffement climatique à 1,5° requiert un changement radical de rythme donc de méthode. Quel changement ? C’est ce que nous allons tenter d’élucider au cours des cinq sessions suivantes.

Cahier des charges commun des solutions mises en débat

Nous nous trouvons dotés du cahier des charges à la lumière duquel juger la pertinence des propositions qui seront débattues au cours des séances 4 à 8 :

1 L’action doit viser à réduire à un rythme annuel défini l’empreinte carbone totale de la société. En bon français et en cessant de tourner autour du pot, cela signifie un rationnement de l’énergie fossile correspondant à cette empreinte, avec abaissement annuel de ce plafond.

2. Il y a obligation de résultat : les mécanismes économiques, sociaux, politiques et technologiques à mettre en place doivent inciter tous les acteurs à transformer qui les mécanismes fiscaux et les financements privés et publics, qui les systèmes de production et d’échange, qui l’aménagement du territoire, qui les modes de vie pour assurer ce résultat et la répartition des efforts de réduction annuelle de l’empreinte.

3. Dans le contexte d’interdépendances économiques planétaires, à travers des filières globalisées de production et un marché mondial des capitaux, il est indispensable pour assumer l’obligation de résultat de saisir les émissions carbonées tout au long de la filière et d’organiser l’évolution de ces filières dans le respect (ou la dénonciation?) des multiples accords multilatéraux, comme l’OMC ou le Traité de la Charte de l’énergie, et bilatéraux qui fixent les règles du commerce international.

4. L’énergie étant présente dans tous les actes de notre vie et quels que soient les revenus des uns et des autres, les solutions adoptées doivent rendre compatible l’obligation de résultat et la justice sociale.

5. Poursuivre le bien être de la société, ne pas renoncer à l’ambition de le développer, tout en réduisant chaque année notre empreinte carbone suppose un découplage radical entre développement du bien être et consommation d’énergie fossile. Malgré trente ans de discours sur l’efficacité énergétique et l’intensité en carbone de nos économies, ce découplage n’a à ce jour été réalisé qu’à la marge. Tout système proposé doit donc dire comment il peut se produire effectivement.

6. La dépendance de nos modes de vie et nos modes de production à l’égard de l’énergie fossile est si étroite que quels que soient les mécanismes économiques, politiques et sociaux choisis pour assurer l’obligation de résultat il faut s’assurer que le changement proposé est physiquement possible, et moyennant quelle réorientation massive des financements et des technologies. Si tout n’est pas prévisible, notamment dans le champ des technologies de rupture, et si on attend précisément de nouveaux mécanismes mis en place de créer une dynamique nouvelle, faisant émerger des solutions aujourd’hui insoupçonnées (et l’exemple des guerres montre combien un peuple est capable de réorienter toutes ses énergies et toutes ses créativités quand sa survie est en jeu), il est souhaitable que les solutions proposées par les uns et les autres s’accompagnent d’un scénario technique montrant l’ampleur des transformations, leur rythme, leur faisabilité technique et financière.

Palette des solutions mises en débat

Il n’y a pas une infinité de manière de gérer le rationnement d’un bien et sa répartition entre toute la population, en réduisant le plafond année après année. En tout cas l’expérience des trente dernières années prouve que se fixer un objectif global puis énoncer une multitude d’obligations ou d’interdictions supposées permettre d’atteindre cet objectif n’a jamais marché. C’est donc un mécanisme capable de réorienter les volontés et les initiatives de tous les acteurs qu’il faut rechercher. Dans la suite des séances, on distinguera trois familles de solutions :

Première famille : le signal prix. Réduire progressivement la demande en fixant un prix de plus en plus élevé à la tonne de CO2 rejetée dans l’atmosphère et redistribuer les revenus tirés de la vente de cette enchère carbone (la quantité totale émise étant donnée par l’obligation de réduction annuelle) de façon à respecter un principe de justice sociale.

Questions majeures posées :

a) comment prend on en compte les émissions tout au long de la filière ?

b) comment fixer le prix année après année pour aboutir à la consommation totale prévue par l’obligation de résultat ?

c) comment rendre compatible avec les règles du commerce mondial ?

d) si tous les pays n’adoptent pas la même logique, comment maîtriser la fuite des activités économiques vers des pays qui ne jouent pas le jeu ?

e) comment éviter que la redistribution des revenus tirés de la taxation du carbone ne relancent précisément les émissions (effet rebond appelé paradoxe de Jevons)

Deuxième famille : Une politique radicale agissant sur tous les domaines avec des objectifs chiffrés contraignants, en combinant interdictions, obligations, incitations, financements publics et financement de la transition énergétique par l’impôt

Cette seconde famille souffre du discrédit des promesses non tenues depuis trente ans. Elle a néanmoins fondé tant de scénarios optimistes qu’on ne peut pas la négliger. Elle suppose d’identifier toutes les grandes sources d’émission et de se donner une obligation de résultat avec une sanction claire en cas où le résultat n’est pas atteint. Dans cette démarche, on distingue les efforts menés au niveau des ménages, les efforts menés au niveau des entreprises et les efforts menés au niveau des administrations.

 Questions majeures posées :

a) qu’est ce qui fait penser que cette fois une telle politique marcherait ?

b) peut-on prendre en compte de manière correcte les « émissions importées » alors qu’on est privé de moyens concrets d’influencer les activités hors du territoire concerné (ici la France ou l’Europe)

c) comment créer une véritable incitation de chaque acteur ? Quel intérêt majeur a-t-il à transformer radicalement sa logique ?

d) peut-on effectivement découpler de cette manière développement du bien-être et consommation d’énergie fossile ?

e) tout reposant sur la sanction économique ou politique des acteurs qui mettent en place les différents volets de cette transition, comment créer des sanctions effectivement dissuasives et au prix de quels changements juridiques ?

Troisième famille : l’allocation de quotas. Répartir selon une clé prédéfinie le total de l’empreinte entre les acteurs. C’est la gestion la plus directe du rationnement.

En son sein, on peut distinguer deux sous-familles chacune posant des problèmes spécifiques :

-l’allocation de quotas « en amont » visant à plafonner l’empreinte des différentes branches d’activité, auquel cas cette allocation, un peu comme cela se faisait à l’époque des premiers plans quinquennaux en France et plus encore dans la planification des pays communistes, vise à privilégier les branches d’activité jugées prioritaires, y compris les administrations, avec des contrats d’objectifs définissant le rythme de progression de l’efficacité énergétique de chacun d’eux ;

-l’allocation de quotas « en aval », c’est à dire aux bénéficiaires finaux de l’activité économique, les ménages, ce qui revient à créer une « monnaie carbone », chaque achat étant débité en deux monnaies, euro et «unités de CO2 ». La logique générale est une allocation de quotas égale pour tous. Au sein de cette seconde sous famille, un choix essentiel est de savoir si les personnes et ménages les plus frugaux peuvent ou non revendre leur excédents aux plus dispendieux au plan énergétique et à quelles échelles organiser ce marché des échanges.

Questions majeures posées :

a) la traçabilité carbone des filières mondiales pour appréhender, à la manière de la TVA, la totalité de l’empreinte carbone des produits et services ;

b) les risques de fraude et de marché noir ;

c) la difficulté à appréhender tous les échanges au sein du marché unique européen ;

d) en cas d’extension du système au niveau européen, ce qui est le plus logique, la répartition des quotas entre les États membres ;

e) les modalités techniques de paiement avec les deux monnaies (euros et compte carbone), accélérant la dématérialisation de la monnaie ;

f) dans l’hypothèse de points carbone pouvant être vendus et achetés, le risque que les familles les plus pauvres se défassent de trop de points carbone au détriment de leurs besoins essentiels.

Lors de la quatrième session, un premier exposé sera fait de ces différents types de gestion du rationnement, sans planifier de temps de questions de la salle (les questions seront enregistrées). Les sessions 5, 6, 7, 8 permettront d’examiner successivement chaque famille de solutions. Les participants à la session 4 auront donc toute latitude de poster sur le site www.assisesduclimat.eu leurs questions aux intervenants avant les sessions suivantes et un débat sera organisé dans chaque session avec la salle virtuelle.

 

Cette séance exposant la palette des démarches possibles mobilise Christian de Perthuis, Géraud Guibert (La Fabrique écologique), Bettina Laville (Comité 21), Christian Gollier (Toulouse School of Economics, pour le "revenu climatique" développé par le CCL), Denis Payre (Nature&PeopleFirst, porteur du Contrat Mondial), la vision syndicale avec Maxime Blondeau, enseignant (Sciences-po, Mines-Paris) et fondateur de l’éco-syndicat le Printemps écologique.  Armel Prieur décrit le mécanisme de quotas connu sous www.comptecarbone.org